Accueil > S'informer > Blog > Reprise > Transmission PME : meilleure antidote au déclinisme mais attention au coup d’après pour l’acquéreur
Usuellement on observe une valorisation des PME (5 à 20 personnes pour notre propos, avec un homme clef prépondérant) calculée avec un multiplicateur de 4 à 5 fois l’EBE normatif, majorée de la trésorerie excédentaire. En d’autres termes, l’acquéreur accepte un taux de risque annuel implicite de 20 à 25%, ou en langage plus immédiat achète 4 à 5 années de résultat récurrent a minima. Les banquiers accordant un financement sur 7 ans, business plan et apport personnel doivent balancer l’opération de désendettement.
Dans un environnement économique linéaire, avec une « histoire » de l’entreprise résiliente, le sujet pour l’acquéreur va porter principalement sur la compréhension de la matrice d’activité et rentabilité du cédant et ses opportunités d’amélioration. Le repreneur peut être un acteur en croissance externe (recherche de volume, de nouvelle géographie, complémentarité d’activités, nouvelles synergies) ou une personne physique quittant un groupe, désireuse de liberté et d’indépendance, capitalisant sur son expérience.
L’évaluation du risque est historiquement au centre de la négociation, l’usage est de retenir un taux unitaire pour la capitalisation de l’EBE (EBE/20% ou EBE/25% etc…) ou pour des modélisations de plans d’affaires et tests d’audit sur la valeur des actifs. Ainsi une PME dégageant un EBE normatif de 100 serait valorisée 100/0,25 = 400 ou 100 x 4 = 400, trésorerie excédentaire en plus.
Mais de nombreux facteurs viennent aujourd’hui bousculer et accroitre le risque du futur. Chacun les connait, on citera notamment :
- Géo-politique : la réglementation générale est de plus en plus contraignante, notamment dans la protection de l’environnement, comme avec le zéro artificialisation des sols à horizon 2050, les zones ZFE, les refus de permis de construire pour l’habitat ou… des piscines, les interrogations pour une comptabilité carbone avec reporting obligatoire pour le RSE, et les questions nombreuses sur la distribution de l’eau, le sujet des déchets. Les exemples sont bien nombreux.
- Pression écologiste exacerbée sur les projets d’infrastructures et le transport : quel besoin d’autoroute ou de ligne tgv Lyon-Turin, ou nouvelles pistes aéroport ou bassins d’eau etc….
- Géo-économie : paramètres d’inflation et pricing power ou capacité à tenir son résultat,
- Et surtout l’IA sur les métiers et les fonctions qui ébranle l’incertitude des besoins demain … Tous les fonds financiers s’interrogent aujourd’hui sur le devenir de leurs start-up innovantes.
Au total, les activités sont perturbées : essayez de vendre une affaire de feux d’artifice en PACA quand on sait qu’il faut arroser le terrain dès le matin, le 14 juillet, et après le tirage le soir, avec en outre les risques d’incendie… ou une affaire de piscine (la préfecture du Var refuse les permis). Tous les modèles d’affaires sont à reprendre avec l’analyse des risques pour demain et des taux différents selon des scenarii et la dimension éloignée du temps.
L’acquéreur ne travaille plus demain mais un contexte qui posera la question : mon entreprise sera-t-elle cessible dans 7 ans ou davantage ? Le maréchal-ferrant du 19éme siècle n’est plus là (ou presque), et pourtant il avait du travail, la réflexion stratégique est donc au centre de sa décision, perte de chance ou nouvelle opportunité ?
Une bonne incitation pour les vendeurs de PME à ne pas seulement comprendre la valeur aujourd’hui de leur société mais aussi celle de demain. Certes l’animateur ne sera plus le même, après la cession, mais la déformation des risques fondamentaux reste au centre des questionnements des acquéreurs et banquiers.
De notre observation du prix des PME, ces sujets sont encore loin des modèles de valorisation.